EDITO - MAI 2008

Retour Accueil


Pour ou Contre (réaction) ?

A la fin des années 1930, à l'aube de l'amplification électronique de qualité, Stephen Black applique un procédé révolutionnaire aux amplificateurs à tubes :
LA CONTRE REACTION, également mise en "musique" par messieurs Bode et Nyquist concernant les critères de stabilité de cette nouvelle fonction (marge de gain, marge de phase).

Comme à l'habitude, deux écoles techniques (voire une troisième évoquée ci-après) vont s'affronter sur la base de ce nouveau principe :
Faut-il appliquer ou non (zero feedback) une contre réaction sur un amplificateur ?

Rappelons brièvement que la contre réaction consiste à renvoyer une portion du signal électrique de sortie de l'amplificateur vers l'entrée afin d'améliorer la bande passante et la distorsion de l'ensemble, ceci au détriment du gain qui est facilement compensable.

Sans refaire un traité théorique complet sur ce sujet qui a passionné tous les ingénieurs de conception audio, examinons simplement trois cas :

1er cas : AMPLIFICATEUR SANS CONTRE REACTION :
Le gain total de l'amplificateur est donné par addition du gain de chaque étage élémentaire.
Le nombre d'étages peut être faible puisque la contre réaction n'existe pas et donc le gain propre de l'amplificateur est maximal.
Par contre la bande passante est liée aux principes d'amplification employés (schéma, technologie, nombre d'étages, transformateur, ...) et il n'existe pas d'amélioration possible grâce à la contre réaction.
Dans le cas de la Haute Fidélité, elle se doit de couvrir au minimum 20 à 20000 Hz (-3dB).
Quant à la distorsion, elle croit très rapidement au delà d'une certaine puissance puisqu'il n'existe aucune limitation contrôlée du gain.
La réponse impulsionnelle est en général excellente : le signal est intégralement transmis (dans la limite de la saturation) avec le minimum de constantes de temps.

2ème cas : AMPLIFICATEUR AVEC CONTRE REACTION :
Plus la portion de contre réaction appliquée à l'entrée de l'amplificateur est grande (en général de 6 à 26 dB), plus la bande passante est élargie, plus le gain diminue et la distorsion globale diminue également.
L'impédance de sortie est également diminuée et donc le facteur d'amortissement (tenue des haut parleurs) s'en trouve amélioré : miracle !
Mais ceci au prix de plusieurs contraintes non négligeables :
- le nombre d'étages doit être beaucoup plus important puisqu'il faut compenser la perte de gain,
- le nombre de constantes de temps passe-bas est augmenté d'autant, d'où un retard et une déformation importante d'un signal impulsionnel ou transitoire de base :
LA MUSIQUE !
La bande passante de l'amplificateur sans contre réaction est souvent médiocre mais la contre réaction fera tout rentrer dans l'ordre ...
- la ré-injection du signal de sortie sera à son tour amplifié avec un certain retard qui vient créer un autre type de saturation avec une sensation de pointe aigue, de manque de naturel très désagréable à l'oreille, habituée à recevoir toute les impulsions sans déformation.
Bref, on amplifie à nouveau une partie du signal dégradé.
La réponse transitoire s'en trouve modifiée avec un amortissement qui provoque en plus un certain effet de traînage auditif.

LE TROISIEME CAS est un compromis judicieux des deux précédents :
Le concepteur a choisi d'appliquer localement la bonne dose de contre réaction sur des étage critiques, sans venir perturber à outrance le gain et la réponse impulsionnelle.
On retrouve ce choix sur les excellents amplificateurs modernes ou professionnels.

Au delà de cette prose technique que tout audiophile se doit d'avoir un minimum en mémoire, il nous reste LA MUSIQUE :
Notre plaisir d'écoute sera donc étroitement lié à la qualité même de la conception de l' amplificateur de base (dit en "boucle ouverte"), la contre réaction étant un artifice utilisé pour masquer un certain nombre de défauts ....

Malgré toutes les mesures nécessaires : signaux carrés, réponse transitoire ou salves, distorsion par harmoniques, distorsion par intermodulation, les paramètres psycho-acoustiques sont tellement nombreux que c'est votre oreille qui fera en final la différence.
Pourquoi nos amplis qui ont tous une bande passante de 20 - 20000 Hz (dans certains cas proche du MHz -sic- même mon chat ou ma chauve-souris ne s'y retrouvent pas) sonnent-ils si différemment ??

Venez donc écouter quelques exemples de ces différences (sur rendez-vous) :

 Puissance   Technologie   Mode   Contre Réaction 
 2 x 8W   Tubes   Pseudo Triode   Zero Feedback 
 2 x 17W   Tubes   Ultra Linéaire   Locale 
 2 x 125W   Transistors   Symétrie Totale   Globale 12dB 





Musicalement vôtre,

Laurent SCHWARTZ
Ingénieur du Son

© 05/2008 AUDIO MUSICAE